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L’État et ses fonctions

L’État et ses fonctions : points de vue philosophiques

« Moi, L’État, je suis le peuple », cette affirmation reprise par le philosophe allemand Friedrich Nietzsche. représentait selon lui, le plus grand mensonge de l’Etat. Pourquoi cette position ?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord rappeler ce qu’est l’État.  du latin status, représente l’instance gouvernante de la société. Il existe différents types d’États selon les époques et les cultures envisagées, mais aussi des sociétés qui fonctionnent sans, comme nous allons le voir.

♦ Les fonctions réelles de l’État

 L’État.  du latin status, représente l’instance gouvernante de la société. Il existe différents types d’États selon les époques et les cultures envisagées, mais aussi des sociétés qui fonctionnent sans, comme nous allons le voir.

Le rôle fondamental de l’État est d’être le garant de la sécurité et la justice. Mais est-ce bien le cas ? Est-il indispensable à la vie en société ou au contraire, une société peut-elle fonctionner sans Etat ? Ou encore, l’Etat n’est-il établi qu’en faveur d’une classe dominante en vue de garantir ses intérêts ?

Le régime politique ou la forme de gouvernement désigne l’organisation des pouvoirs et leur exercice au sein d’une entité politique donnée. Ces termes renvoient donc à la forme institutionnelle du pouvoir mais aussi à la pratique découlant de cette forme institutionnelle. Rappelons qu’il faut distinguer l’État de la notion de gouvernement. En effet, un gouvernement est considéré comme un instrument au service de l’État, unité composée d’un territoire, d’un peuple et d’une autorité publique. Un gouvernement est une institution politique qui exerce le pouvoir exécutif du pays, mais dans certains contextes, c’est l’ensemble des institutions qui ont un pouvoir.

Exemple : Dans un régime parlementaire, le gouvernement est responsable politiquement devant le parlement ; dans un régime présidentiel, le gouvernement n’est responsable que devant le chef de l’État. Le gouvernement décide et entreprend les actions nécessaires à la conduite de l’État. Le régime politique correspond à la forme de gouvernement en place.

Les différents types d’État/gouvernement

Il existe différents types de régime politique tels que la monarchie, absolue ou constitutionnelle, l’oligarchie, la théocratie, la démocratie, etc.

Le régime politique ou la forme de gouvernement désigne l’organisation des pouvoirs et leur exercice au sein d’une entité politique donnée. Ces termes renvoient donc à la forme institutionnelle du pouvoir mais aussi à la pratique découlant de cette forme institutionnelle. C’est la souveraineté, définissant l’exercice du pouvoir, qui permet de définir le type de gouvernement.

La Monarchie (grec mono = seul / archè : commandement ou pouvoir ou autorité) :

  • Absolue : liée à l’hérédité. Forme d’autocratie où le pouvoir politique et social est aux mains d’un seul individu privilégié, du fait de sa lignée.
  • Constitutionnelle : régime politique qui reconnait un monarque élu ou héréditaire comme chef d’État mais dont les pouvoirs sont limités par une constitution. Les monarchies constitutionnelles modernes sont essentiellement parlementaires. Exemple de la Grande bretagne.

 La dictature/régime politique totalitaire :

Une dictature est un régime politique dans lequel une personne ou un groupe de personnes exercent tous les pouvoirs de façon absolue, sans qu’aucune loi ou institution ne les limitent. il faut préciser que même un régime autoritaire peut avoir des lois, des institutions, voire un parlement avec des députés élus, mais pas librement et ne représentant donc pas des contre-pouvoirs. Hannah Arendt affirmait ainsi que les lois de cet État sont factices et éthiquement illégitimes.

Les démocraties (demo : peuple/Kratos : pouvoir)  : Système où les citoyens élisent des représentants parmi eux pour former un organe directeur, tel qu’un parlement. La démocratie est parfois appelée « règle de la majorité ». On distingue : la démocratie directe/la démocratie représentative/la démocratie participative/la démocratie libérale.

Les principales caractéristiques de ce type de régime sont :

  • compétitions électorales : les élections sont régulières, se font au suffrage universel et le pluralisme politique est reconnu ;
  • État de droit: les libertés fondamentales sont garanties, il y a une constitution définissant les pouvoirs des différentes branches de l’État, il y a également une séparation entre la sphère publique et la sphère privée ;
  • division en trois pouvoirs séparés : le législatif, l’exécutif et le judiciaire sont séparés et se contrôlent mutuellement ;
  • gouvernement de la majorité : la majorité est au pouvoir, la protection de l’opposition (minorité) est assurée, l’alternance est possible ;
  • séparation entre l’Église et l’État : neutralité confessionnelle de l’État, égalité de traitement entre les différents régimes religieux, pas de prise en charge totale par l’État des frais et activités des confessions religieuses.

Il s’agit d’un idéal-type et il est possible de trouver certaines exceptions comme en Grande-Bretagne où le Chef de l’État (actuellement la Roi) incarne aussi le chef de l’Église anglicane, ou bien comme en Belgique où l’enseignement catholique est financé par l’État Belge.

La République (res publica : chose publique): Dans une république où le chef d’état n’est pas héréditaire. On distingue plusieurs régimes en fonction de l’articulation entre le chef d’État et le chef du gouvernement.

L’oligarchie : L’oligarchie, qui signifie « règle du petit nombre », est une forme de structure de pouvoir dans laquelle le pouvoir appartient à un petit nombre de personnes. Ces personnes peuvent se distinguer par la noblesse, la richesse, les liens familiaux, l’éducation ou le contrôle des entreprises, de la religion ou de l’armée.

La théocratie : Une théocratie est tout d’abord, comme son no l’indique, un gouvernement dans lequel une ou plusieurs divinités sont reconnues comme autorités suprêmes, ou, au sens dérivé, un régime politique fondé sur des principes religieux ou gouverné par des religieux. Cependant, à partir du XIXème siècle, on envisage plus largement les théocraties comme des régimes politiques dans lesquels les gouvernements s’appuient sur des principes religieux ou des États dirigés par des religieux. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le sociologue allemand Max Weber proposa de « rebaptiser » la théocratie en hiérocratie, en référence à l’étymologie du mot « hiero » signifiant « sacré » en grec.

L’anarchie : Système sans gouvernement, qui préconise des sociétés autogérées basées sur des institutions volontaires. Les citoyens exercent le pouvoir directement. Elles peuvent être non hiérarchiques, ou incluent des groupes hiérarchiques, mais dont l’adhésion et l’association à ces groupes reste entièrement volontaires.

L’autocratie : L’autocratie est un système de gouvernement dans lequel le pouvoir suprême (social et politique) est concentré entre les mains d’une seule personne ou d’une seule entité politique, dont les décisions ne sont soumises ni à des contraintes juridiques externes ni à des mécanismes réguliers de contrôle populaire (à l’exception  peut-être de la menace implicite d’un coup d’État ou d’une insurrection de masse).

♦Positions philosophiques quant à l’Etat

 Les philosophes se distinguent sur deux positions : ceux qui critiquent voire veulent la destruction de l’État et ceux qui font l’apologie de l’État.

Les critiques :

Pour les philosophes qui contestent la légimité du pouvoir étatique, l’État est un appareil répressif au service d’une classe privilégiée. C’est notamment la position de karl Marx  qui affirme :

« L’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de la lutte des classes ».

Le communisme

En effet, il constate que toutes les sociétés Humaines sont divisées en classes, depuis l’Antiquité, avec des intérêts opposés, ceci malgré l’abolition de l’esclavage ou des privilèges, etc. Les diférents changements sociaux et révolutions n’ont ainsi pas détruit la discrimination et les inégalités.

Au 19ème,,, Marx montrent que prolétaires sont abusés et dépossédés de leur force de travail par les bourgeois qui détiennent les moyens privés de production et L’État  est devenu un instrument au service de cette classe dominante, maintenant son pouvoir par la force, à l’avantage de la bourgeoisie : exploitation de l’homme pour l’homme.

Le philosophe grec antique Thrasymaque affirmait déjå, en son temps que : « le juste est l’avantage du plus fort ».

Ainsi, l’Etat déclare juste ce qui sert son avantage. C’est aussi la position défendue par Engels qui énonce l’hypothèse que l’Etat apparait à un stade de l’histoire où la lutte des classes menace l’existence même de la société,  pour donner à la classe dominante de nouveaux moyens pour mater et exploiter la classe opprimée »

Par conséquent, grâce à l’État, la classe économiquement dominante devient aussi politiquement dominante.

Pour Marx, la révolution prolétarienne devient ainsi nécessaire car pour qu’une société soit juste et libre, il faut qu’elle soit sans classes et sans État. L’Etat communiste doit permettre l’abolition de la propriété privée des moyens de production et ensuite, et seulement ensuite, l’Etat pourra disparaître.

 L’Anarchisme (du grec anarkhia :absence de chef)

Les anarchistes contestent, quant à eux, non seulement l’autorité de l’État mais réclament sa destruction. C’est le cas du philosophe et penseur russe M. Bakounine qui assure qu’il y a nécessité  de détruire l’État car celui-ci s’oppose à la liberté de l’individu. L’État imposerait par la force un ordre injuste.

Rappelons la devise anarchiste “ni dieu ni maître”, qui nous montre bien la volonté anarchiste de s’émanciper de toute forme de pouvoir qui pèserait sur l’individu.

« Nous pensons que la politique, nécessairement révolutionnaire, du prolétariat, doit avoir pour objet immédiat et unique la destruction des Etats » affrime Bakounine, qui se veut radical quant la façon d’envisager notre positionpar rapport de l’État.

Le philosophe russe P. Kropotkine, quant à lui, se réclame de l’idéal anthropologique que l’Homme est capable de vivre sans rien ni personne pour le gouverner.

« Nous sommes persuadés que l’immense masse des hommes, à mesure qu’ils seront de plus en plus éclairés et se débarrasseront des entraves actuelles, fera et agira toujours dans une direction utile à la société ».

Plus qu’un anarchiste, P. Kropotkine est ce qu’on appelle un libertaire, courant philosophique dont la devise pourrait se résumer ainsi : « fais ce que tu veux, comme tu veux ». Pour les libertaires, la violence, l’injustice, la cruauté, l’avidité ou encore la guerre, ne seraient que le résultat des frustrations engendrées, chez l’individu, par l’État, instance du pouvoir injuste et inégalitaire.

L’apologie de l’Etat

Cependant, certains philosophes soulignent, au contraire, le danger de telle position, affirmant que l’existence de l’État est d’autant plus iondispensable qu’il est la seule instance capable de maîtriser les pulsions destructrices de l’Homme.

C’est le cas du philosophe anglais Thomas Hobbes qui fait sienne l’ancienne devise du philosophe romain Plaute « l’homme est un loup pour l’homme ». Les hommes sont, en effet, en constance compétition comme dans le monde animal. Ils recherchent la puissance, la gloire, la défiance. De plus, ils sont jaloux, orgueilleux evaniteux et convoitent les mêmes choses. Ainsi, l’état de nature est un état de guerre perpétuelle, il faut donc un pouvoir qui soumette les hommes et les maintiennent en respect :

« Tant que les hommes ne sont pas tenus en respect par un pouvoir commun, il vivent dans cet état que l’on nomme la guerre ».

L’Etat devient donc le garant de la sécurité et de la paix, les hommes renonçant ainsi à leur liberté pour échapper à la misère, le violence et l’insécurité de la vie naturelle. Ils acceptent de confier le pouvoir et la liberté à une seule instance gouvernante.

 

Le philosophe et juriste français Montesquieu défend une position proche mais plus nuancée. En effet, il estime que la liberté individuelle est essentielle dans un État juste mais qu’il est n´cessaire de nuancer la notion de liberté qui, en aucun cas, ne peut être celle défendue par les libertaires ou anarchistes car,  si la liberté est de faire tout ce que l’on désire, il n’y a plus de liberté du tout. Pour lui, l’Etat n’est pas un obstacle mais bien une condition à la liberté, plus particulièrement, celle de tous. Non une liberté absolue mais une liberté relative qui assure les mêmes droits à tous. C’est pourquoi il estime que :

“ La liberté est de faire tout ce que les lois permettent”.

 Il s’agit alors pour l’État d’assurer la liberté pour tous tout en limitant celle de chacun.

Cependant, Montesquieu a conscience qu’un tel pouvoir aux mains de l’État peut représenter un danger car il « est connu que tout homme ayant du pouvoir tend à en abuser » Il faut donc que le pouvoir arrête le pouvoir, ique le pouvoir de l’Etat soit limité. Il propose alors la séparation des trois pouvoirs, toujours en vigueur aujourd’hui dans toutes les démocraties du monde : législatif, exécutif et judiciaire.

Ceci nous conduit à nous poser la question du meilleur régime politique possible.

♦ Le meilleur régime politique

Ainsi les philosophes, mais aussi bon nombre de peuples, se sont interrogés sur l’établissement du meilleur régime politique possible. Cela nous renvoie aux notions de droit et de justice que l’Etat doit incarner.

Prenons quelques exemples de position philosophique.

Pour Platon, il est impossible de confier le pouvoir au peuple car c’est le confier aux démagogues et à l’opinion : « confier le pouvoir au peuple c’est faire marcher la cité sur la tête ». La démocratie, en accordant trop de libertés, ruine toute autorité, ce qui conduit à l’anarchie et même la tyrannie.

Tandis que pour Rousseau, pour qu’un Etat soit le plus juste possible, le peuple doit être l’auteur des lois en vigueur dans celui-ci. Il rejette l’idée aristotienne d’un État paternaliste, ou celle d’un État fondé sur la force, comme dans les dictatures car la liberté étant inaliénable, elle n’est obtenue que par un consentement mutuel du peuple à se soumettre à une autorité qu’il a lui-même choisi et qui garantira de servir les intérêts de tous, cela au travers de lois décidées ensemble : le contrat social.

Ces idées, largement répandues dans la philosophie des Lumières, préfigurent ainsi le régime démocratique.

Pour Alexis de Tocqueville, trop d’égalités,  comme en France, peut tourner à la dictature. En effet, l’égalité prime alors sur la liberté qui pousse chaque individu à désirer obtenir tout ce que son voisin possède.

Quant à Marx, il estime que  l’Etat démocratique est et reste aux mains de la bourgeoisie.

Cependant, il est important de noter que ce n’est jamais la démocratie elle-même, en tant que principe, qui est remise en question mais plutôt la façon dont l’Etat est dirigé, donc le comportement des hommes. Ce qui fait dire à Churchill que ;

“ La démocratie est le pire des régimes à l’exception de tous les autres”.

Néanmoins, notons qu’il existe autant de façon de diriger que de sociétés humaines : patriarcat, matriarcat, société dirigé par un conseil, d’hommes ou de femmes, ou les deux, par les anciens (exemole des Yanonami, Tahitiens, Marquisiens, Nuer, Dakotas, Pygmées).

De plus, il existe des sociétés dites sans Etat, comme l’a notamment montré l’anthropologue Pierre Clastres, dans son livre La société contre l’État, dans lequel il montre que certaines sociétés dites “primitives” pensent non seulement l’État mais le refusent, comme certains groupes ethniques amérindiens du sud. Il remet ainsi en question la notion de sociétés primitives. En effet, pourquoi penser ces sociétés comme privées de quelque chose car non policées ? Ce préjugé est remis en question car il repose sur l’idée que toute société a pour destin l’Etat. Or, il faut toutefois noter que ces sociétés fonctionnent, volontairement, avec un nombre limité d’individus. Est-ce à dire qu’un nombre plus conséquent entraînerait fatalement l’apparition de l’appareil étatique?

Petit rappel de la position de Marx quant au rapport entre Etat et économie :

 « La relation politique de pouvoir précède et fonde la relation économique d’exploitation. Avant d’être économique, l’aliénation est politique, le pouvoir est avant le travail, l’économie est une dérive du politique, l’émergence de l’Etat détermine l’apparition des classes ».

On comprend donc qu’il est extrêmement difficile voire utopique de créer un Etat idéal et que tout régime politique s’expose à divers dangers et dérives possibles, liés notamment à l’égo humain, et ce dans les sociétés avec État. Est-ce à dire pour autant qu’une société sans État assurerait le bonheur de l’humanité, tel que le pensent les anrachistes et/ou les libertaires? N’oublions qu’être libre de ses actions et pensées implique la même chose pour autrui. Ainsi, que ferions-nous sans lois? Que ferions-nous contre l’individu A qui convoite les biens de l’individu B? Peut-on compter sur “la sagesse” humaine pour nous guider ou, au contraire, l’Homme étant “un loup pour l”homme”, ne faut-il pas limiter la liberté de chacun pour mieux nous protéger?

Autant que question qu’il est nécessaire de se poser si l’on s’interroge sur les notions d’État mais aussi de justice et de droit.

Friedrich Nietzsche, La Volonté de puissance, 1886.

Thomas Hobbes, Léviathan, 1651.

Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, 1762

Kar Marx et Friedrich Engels, Manisfeste du parti communiste, 1848.